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In the Air – Jason Reitman – EEE – Oh la belle poire!

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In the air raconte l’histoire d’un homme qui accède à la maturité, état de conscience malheureux qui rend les êtres pensifs et peu enclins à rêver. Un homme mature ressemble à une poire blette, sur la branche, il est insouciant, beau, gorgé d’illusions et maître de l’univers, quand il tombe, la dure réalité reprend ses droits, il n’est plus qu’un fruit pourri, il est moche, soucieux et pareil à beaucoup d’autres. Georges Clooney interprète un fruit pourri dont les filles feraient bien un clafoutis.

Chargé d’annoncer à d’honnêtes travailleurs que leur entreprise n’a plus besoin d’eux, il sillonne le ciel américain et proclame la bonne parole d’est en ouest. Les braves gens qu’ils rencontrent ont l’allure de braves gens, ils sont gras, laids et portent sur leur visage l’empreinte de la maturité. Dans la réalité, la densité de l’air est faible, les organes s’étalent, les chaires deviennent flasques et le corps se répand. Georges Clooney ne vit pas dans la réalité, il a un physique affûté qui plaît aux dames. Il erre dans un monde illusoire où la solidité des attachements humains n’est assurée que par le plaisir égoïste qu’il éprouve à les entretenir. Aussitôt qu’une affection instille cette sourde dépendance à l’autre qui fait les joies et le tourment de l’amitié, il y renonce. Il est dans les airs, libre, étincelant de cette liberté qui rend les hommes solitaires séduisants. Il ne souffre jamais du doute insidieux qui porte les adultes à considérer d’un œil suspicieux les sentiments qu’on leur voue, seul compte la satisfaction de son inclination. Il suce le pollen de chaque fleur, le savoure avec la mine d’un enfant capricieux et finit par s’envoler vers une autre corolle, petit butineur d’amour, léger, jamais ivre, toujours content. Mais secrètement malheureux.

Signe d’une puérilité candide, il est un produit de notre temps. L’homme moderne est pourri jusqu’à la moelle par la conviction que ses droits comme individu prévalent sur tous les autres. Il est un enfant terrible qui se berce de l’illusion d’être suffisant. Il consomme les plaisirs, ne souffre pas mais n’est pas très heureux, survient un jour ou la vanité de son existence éclate avec tant de fracas qu’il court acheter une boîte de Lexomil. Ou alors il se contemple dans La ferme célébrités*, le spectacle d’une détresse plus grande que la sienne suffisant à le consoler.

poire-martin-sec-600 dans Le cine d'Edouard

Le film de Jason Reitman est un film réactionnaire qui stigmatise l’homme moderne. Il vaut mieux être le fruit pourri tombé sur le sol que la belle poire se balançant au vent. La belle poire est seule, égoïste, malheureuse. Le fruit pourri a perdu ses illusions de belle poire mais il n’est plus seul et se repaît du bonheur de partager sa déchéance (pour toute autres comparaisons végétales, on achètera avec intérêt Le manuel du bon jardinier paru chez Flammarion). Georges Clooney est une belle poire que la rencontre avec une poire plus belle encore va abîmer, dans ses pérégrinations il est accompagné d’une pomme encore jeune qui voudrait bien devenir une belle poire mais qui finira rétamée. Le tout donne un cidre brut agréable mais manquant de pétillant.

Dans Juno du même réalisateur, on avait apprécié la fraîcheur de l’interprète principale et l’humour des dialogues. Dans ce film, l’humour est moins prégnant, le ton est léger mais ne décolle jamais vraiment. Heureusement, les interprètes sont exceptionnels. De Georges Clooney, gravure de mode un peu blasée à Vera Farmiga, blonde classieuse pas si fatale à qui on donnerait bien la main en passant par la jeune pomme, Anna Kendrick, le casting est impeccable et enlève notre adhésion. L’image est un peu terne, les couleurs sont assourdies et donnent au film une tonalité sale en accord avec l’amertume du constat qui est finalement dressé.

Divertissement plaisant et intelligent. Très recommandable. EEE.

Edouard.

*Sur ce blog, réflexions autour de la télé réalité

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